Pavés de mémoire
Jeudi 27 avril 2023
Pour préserver la mémoire des victimes du nazisme et ne jamais oublier leur nom, depuis plus de 20 ans, l’artiste allemand Gunter Demnig place des pavés spéciaux devant les maisons où les victimes vivaient et ont été arrêtées avant d’être tuées. Parmi ces victimes, il y a des Juifs, des Roms, des homosexuels, des personnes poursuivies pour des raisons politiques, des handicapés…
Ces petites plaques commémoratives portent des inscriptions qui commencent la plupart du temps par ces mots : « Hier wohnte » (Ici habitait). Sur les lignes suivantes figurent le prénom, le nom, l’année de naissance, l’année et le lieu de déportation ainsi que des indications sur le sort de la victime.
Plus de 80 Pavés de Mémoire ont été posés à Rouen et son agglomération. Vous pouvez connaitre les lieux et l'histoire des familles en cliquant ici.
C’est au tour de Petit-Quevilly d’honorer la mémoire dela famille Weisz qui habitait au 105 rue Jacquard, aujourd’hui le 7/9 avenue Jacques-Prévert.
Le jeudi 27 avril 2023, devant l’ancienne adresse de la famille assassinée à laquelle la Ville rend hommage, l’artiste Gunter Demnig est venu lui-même sceller ses Pavés de Mémoire, qu’il a apporté, avec ses outils et son ciment.
Pendant la pose, la maire Charlotte Goujon, la présidente de l’association des Pavés de mémoire Mme Bouillot et les enfants de l’école Méret ont rendu hommage à la famille Weisz. Les enfants, accompagnés des élus, ont déposé des roses blanches avec une minute de silence en hommage aux défunts. La chorale de l’EMMDT (60 chanteurs) a interprété le Chant des Marais pour clôturer la cérémonie.
Biographie de la famille Weisz
Dans l’ancienne impasse Jacquard à Petit-Quevilly habitaient Eugène, Rose et Jean-Pierre Weisz. Eugène (Jenő) Weisz, né le 31 janvier 1905 à Akli, passe son enfance en Transylvanie, rattachée à l’époque à l’Empire austro-hongrois. De nationalité hongroise, il vit à partir de 1921 à Budapest, où il commence à exercer son métier de bobinier électricien. C’est sans doute là qu’il rencontre sa future épouse, Rose (Rosa) Forgacs. Celle-ci est née le 10 avril 1909 à Kansas-City de parents juifs hongrois émigrés aux États-Unis, mais elle est revenue avec eux dès sa prime enfance en Autriche-Hongrie. Plus tard, à Budapest, elle exerce le métier de couturière. En 1930, Eugène Weisz part en France pour y chercher du travail et trouve un emploi dans une entreprise d’installations électriques à Elbeuf. Installé dans cette commune, il fait venir Rose qu’il épouse le 31 octobre 1931.
Au moment de l’arrivée de son unique enfant, Jean-Pierre né le 15 septembre 1936 à Mont-Saint-Aignan, le couple habite à Rouen. Rose n’exerce pas d’activité professionnelle. La famille vit ensuite à Saint-Étienne-du-Rouvray, puis s’installe en janvier 1940 à Petit-Quevilly, où elle habite d’abord 5 place des Chartreux et, en dernier lieu, 105 rue Jacquard (aujourd’hui situé au 7/9 avenue Jacques-Prévert). Depuis août 1940, Eugène est chef-bobinier aux Ateliers de Réparations et d’Installations Électriques de Rouen. Même s’ils sont considérés comme bien intégrés, les époux Weisz n’ont pas obtenu la nationalité française qu’ils avaient sollicitée en 1937 ; seul Jean-Pierre est devenu Français par déclaration de ses parents. Durant l’année scolaire 1942-1943, le petit garçon est écolier. Fichés et traqués comme Juifs dans la France occupée, Eugène, Rose et Jean-Pierre Weisz sont victimes de la grande rafle de Seine-Inférieure organisée par la section antijuive de la Gestapo de Paris en liaison avec la Sipo-SD régionale.
Dans la nuit du 15 au 16 janvier 1943, ils sont arrêtés à leur domicile de Petit-Quevilly par la police française et passent quelques heures au centre d’internement de la rue Poisson à Rouen avant d’être transférés, au matin, au camp de Drancy.Tous trois sont déportés dans le convoi n°47 du 11 février 1943 à Auschwitz. Selon le témoignage d’un déporté de l’agglomération rouennaise rescapé de ce centre de mise à mort, Eugène y est sélectionné pour le travail forcé avant d’être assassiné. Rose et Jean-Pierre, qui a un peu plus de six ans, sont très vraisemblablement envoyés à la chambre à gaz dès leur arrivée.